FRKS

Le duo d’artistes Igor Cardellini et Tomas Gonzalez, avec la collaboration de la comédienne Rébecca Balestra, travaille depuis plusieurs années à réinterpréter des phénomènes de société, tout en y apportant une touche de fantastique et d’onirique. Ainsi dans Un spectacle, ils invitaient le public à explorer un théâtre, dans L’Âge d’or à s’aventurer dans un supermarché, ou dans Showroom à déconstruire un espace d’exposition : autant de lieux et d’expériences pour interroger et réenchanter notre manière d’habiter le monde.

En abordant le sujet du monstre, c’est dans l’espace intime qu’ils lancent leur nouvelle exploration. Après le monstre mythologique ou imaginaire (souvent représenté sur d’anciennes cartes pour remplacer une terra incognita), la bête de foire ou notre fameux monstre du docteur Frankenstein, le trio s’interroge sur sa représentation contemporaine en se référant au discours de Paul B. Preciado «Je suis un monstre qui vous parle...». En 2019, devant un parterre de 3’500 psychiatres, cet écrivain et artiste trans tient un discours qui a fait date, dans une invitation à abolir la terreur d’être anormal.

Le monstre d’aujourd’hui serait-il la figure éco-queer, qui permet de dépasser les catégories et redéfinir les frontières pour les rendre poreuses et fluides entre l’humain et toutes ses relations au monde et à soi-même ? Pour se libérer de toutes les assignations, Paul B. Preciado revendique préférer sa « monstruosité » au « monde ordonné et soi-disant heureux de la norme » et se faire sujet de sa propre histoire en produisant de nouvelles narrations sur soi. Il enclenche un processus de retournement de stigmate où les personnes queer, qui pour lui sont bel et bien des monstres, deviennent des incarnations prophétiques décolonisées, désidentifiées et débinarisées.

FRKS entend donc explorer et célébrer cette figure en proposant un dispositif activant d’une part une parole intime se racontant, et de l’autre, le déploiement au plateau d’une série d’images puissantes.